Mon terrain

Martin Bouffard

Récemment, je suis devenu l’heureux propriétaire d’un terrain.

Rien de trop grand. Juste assez. C’est un terrain qui appartenait à ma famille depuis plusieurs décennies dans un coin relativement tranquille et isolé. Toutefois, les développements domiciliaires et routiers brisent peu à peu cette quiétude mais bon, après tout on ne peut pas tout avoir. Je me console, c’est mon terrain.

Quand viendra le temps, j’y ferai construire ma demeure. Pour le moment, c’est quelqu’un d’autre qui veille à l’entretien. Que voulez-vous, je manque de temps. Je m’y rends à l’occasion pour m’assurer que tout est correct. Le terrain est stable et solide. Même la demeure de mon grand-père érigée tout près depuis plus de 40 ans n’a pas bronché d’un poil. Bien qu’elle commence à subir l’usure du temps, elle est toujours solide et droite comme le roc.

On ne peut pas en dire autant de la demeure de certains voisins. Celle d’un monsieur tout près, s’est affaissée un bon matin. Personne n’est venu la remettre sur pied. Ce doit être une demeure abandonnée car si cette personne avait une famille ou des amis, elle aurait été remise en état. Ma voisine d’en-face, par contre, est assez fière. On m’a dit que c’était une jeune fille qui y demeurait. Sa demeure est toujours entourée de fleurs. J’imagine qu’elle a des enfants car il y a souvent des jouets et des peluches qui l’entourent.

Bref, si un beau jour, vous passez dans mon quartier et que vous constatez que j’y ai élu domicile, n’hésitez pas à venir me voir. Vous ne pourrez pas vous tromper. J’y ferai inscrire mon nom sur la devanture. Et n’hésitez pas à m’apporter des fleurs. Pour vous remercier, je ferai chanter les oiseaux. Et si vous le pouvez, allez voir mes voisins qui semblent délaissés.

Ils ne pourront pas vous le dire de vive voix mais vous leur ferez grandement plaisir. En vous remerciant à l’avance.

Alors, s’il vous plaît, n’oubliez pas de visiter ceux et celles qui se sont endormis pour l’éternité.